jueves, 14 de abril de 2011

Renée Vivien: La Sed se burla



La Soif ricane

Conté par Jim Nicholls.

« Quel étrange coucher de soleil ! » dis-je à Polly.
Nous cheminions sur nos mulets accablés de lassitude et de chaleur.
« Imbécile ! grommela ma compagne. Tu ne vois donc pas que la lueur est à l’est.
—Ce serait l’aurore, dans ce cas-là. Je dois être saoul. Et pourtant, je n’ai pas bu de la journée. »
La marche somnolente des mulets berçait agréablement mes songes.
Nous étions en pleine prairie… Devant nous, un désert d’herbe pâle. Derrière nous, un océan d’herbe pâle. Autour de nous rôdait la Soif. Je voyais remuer ses lèvres sèches. J’entendais ses grelotements de fièvre. Polly, la garce aux cheveux de paille, ne la voyait point, ce qui, d’ailleurs, n’a rien d’étonnant. Polly n’a jamais pu voir plus loin que le bout de son nez rouge de grand air et de soleil.
Je me retournai sur ma selle, en tirant avec force les rênes.
« Pourquoi t’arrêtes-tu ?
—Je regarde la Soif. Sa robe est grise comme l’herbe sèche là-bas. Elle grimace. Elle ricane. Les contorsions de sa carcasse me font peur. Elle est bien laide, la Soif. »
Polly haussa lourdement ses lourdes épaules.
« Tu es fou, Jim. Il n’y a que les nigauds de ton espèce pour avoir comme ça des cauchemars en plein jour. »
Je l’aurais volontiers fait taire d’un coup de pied ou de poing, mais des expériences réitérées et douloureuses m’avaient persuadé que la vigueur physique de Polly surpassait de beaucoup la mienne. Je n’avais sur elle qu’une vague supériorité mentale. Et encore ! Le bon sens de ma compagne m’a souvent tiré d’un mauvais pas, ce que n’auraient pu faire mes divagations de songe-creux.
J’ai reçu de l’instruction, c’est vrai ; mais à quoi sert l’instruction dans les prairies ! Un bon revolver vaut mieux là-bas.
Les cheveux de Polly flamboyaient implacablement sous la lumière. J’eus envie de la scalper, comme font mes amis et adversaires les indiens, afin d’éclabousser de sang cette tignasse blonde. Pourquoi ? Je ne sais pas. Ce sont des idées qui vous viennent, comme cela, dans les prairies.
Je regardai ses joues brunies, qui ressemblaient à deux pommes cuites. J’ignore pourquoi je me souvins à ce moment d’un mince visage très pâle que j’avais aimé autrefois. J’évoquai l’ombre d’une maisonnette, la fraîcheur des persiennes closes et les belles paupières de celle qui lisait. Comme elle était charmante, les paupières baissées ! J’adorais l’ombre des cils sur les joues blanches. Ah !...
Je ne connaissais point alors le métier de coureur de prairie. Je n’avais point rencontré la garce aux cheveux de paille.
Pourquoi ai-je quitté la maisonnette pleine d’ombre et de la lumière verte des volets clos ? Je ne sais pas.
Je ne sais pas non plus si l’étrange petite fille qui lisait pendant de longues heures est vivante ou morte. Je crois qu’elle doit être morte parce que j’ai parfois un si grand vide au cœur !
Mais je ne suis sûr de rien.
Ça vous dérange un peu les idées, d’avoir vu de près la Soif qui rôde dans les prairies.
J’ai choisi pour ma compagne de route cette Polly que j’exècre, ou plutôt elle m’a choisi pour compagnon. Je finirai par la tuer un jour. Cela, je le sais. Je la hais parce qu’elle est vigoureusement saine, et que je suis, moi, un fiévreux débile. Elle est plus hardie et plus solide qu’un mâle. Elle m’enverrait rouler à dix mètres d’une chiquenaude. C’est d’ailleurs une bonne géante, quand elle n’a pas trop bu. Mais, voilà ! Elle se saoule volontiers. Peut-être a-t-elle peur, elle aussi, de la Soif qui nous guette tous les deux.
Je hasardai une réflexion au cours du chemin.
« Il y aura sûrement de l’orage avant peu, Polly, ma fée, ma chimère.
—Idiot ! souffla-t-elle avec conviction. Laisse-moi donc tranquille. Tu ne dis jamais que des choses sottes. Bien sûr qu’il y aura de l’orage avant peu. Ça se voit et ça se sent, et je n’aime pas les mots inutiles.
—Ô ma douceur admirable, ta sagesse est aussi bienveillante que profonde. »
Elle ne daigna point me répondre. Je finirai sûrement par la tuer un jour. Je n’aurai jamais la force de l’étrangler ; mais je lui tirerai dans le dos un bon coup de revolver. Comme ça, ce sera fini et je ne penserai plus à elle. Peut-être que la Soif s’éloignera de moi, quand je l’aurai abreuvée de sang. Qui sait ?
…L’aurore surnaturelle augmentait d’intensité… Nous nous arrêtâmes, le soir venu. Polly me versa, de sa gourde à la panse rebondie, une goutte d’eau de feu. Je bus à sa mort prochaine. Tout à coup la garce s’arrêta de boire. Cela m’étonna un peu. Seule, une chose extraordinaire pouvait ainsi distraire Polly de l’extrême satisfaction que lui procurait sa boisson favorite.
« Que-ce que tu as ? » lui demandai-je avec un affectueux intérêt.
Polly n’aime point en effet les mots inutiles. Je lui rends volontiers cette justice. Les longues marches au soleil l’ont rendue taciturne. C’est bien la compagne qu’il faut à un homme de la prairie… Elle me montra simplement quelques cendres mêlées à l’herbe grise.
Je compris sa pensée. Mes yeux se tournèrent instinctivement vers l’aube étrange qui rougeoyait à l’est. Mais une petite colline m’empêchait de voir ce qui se passait là-bas.
Pollly mâcha un sourd juron… Mes genoux fléchirent sous moi. Elle me toisa de son regard dédaigneux, et, me quittant sans une parole, elle se mit en devoir de gravir la colline.
Je la suivis, par crainte de la solitude, plus odieuse encore que la présence de cette compagne détestée.
Arrivés au sommet, nous haletâmes…
Du nord au sud, l’horizon n’était qu’un brasier…
Le feu dans la prairie ! Un vent de flamme, qui arrive sur vous avec la vélocité du simoun et du sirocco, qui balaie en un clin d’œil le désert d’herbes sèches. Et rien sur son passage qui puisse l’arrêter !
Je grelottais comme un malade qui meurt de la fièvre… Polly, elle, n’avait point peur.
J’oubliai un peu mon angoisse, dans la rage de ne pas la voir claquer des dents. Sa terreur aurait presque rasséréné mon propre effroi. Mais elle est brave, beaucoup plus brave que je ne le suis. Elle ne pâlissait point, parce que rien au monde, ni la mort, ni la trompette du Jugement dernier ne la ferait pâlir… Elle est, d’ailleurs, de complexion rougeaude. Moi, j’étais plus jaune qu’une guinée.
Nous retournâmes en toute hâte vers notre camp improvisé où nous avions laissé paître nos mules, qu’une crainte rendait ombrageuses.
La brise du soir poussait vers nous l’ouragan de flamme.
Je ne crains pas la mort, mais la douleur m’épouvante. La perspective d’être rôti vivant me tenaillait de façon suraigüe. Polly elle-même avait l’air grave, quoique ses nerfs soient plus robustes que des tendons de bœuf.
…Rôti vivant dans la prairie !...
Le feu s’avançait, comme un immense éclair. Je m’étonnai de la rapidité de sa course. Encore quelques minutes et nous serions calcinés tous les deux. Encore quelques minutes, et…
…C’était beau quand-même, cette trombe de flammes. C’était plus beau que le soleil. Jamais je n’ai vu quelque chose d’aussi magnifique… C’était si merveilleusement splendide que je tombai à genoux, et que je tendis mes deux bras vers le Feu, en riant comme les petits enfants et les idiots.
Je vous répète que c’était aussi effroyable que superbe, et que j’en devins presque fou. C’était trop beau pour les yeux d’un homme. Dieu seul pouvait regarder cet embrasement en face sans en mourir ou en perdre la raison.
Mais Polly, qui n’a pas plus d’âme que mes mules ne comprit point et regarda sans voir. Elle ne s’étonne de rien, elle n’admire rien…
Je la haïssais de ne point avoir peur. Oh ! comme je la haïssais !... Je la hais férocement, parce qu’elle est plus forte et plus vaillante que moi… Je la hais, comme une femme exècre l’homme qui la domine. Je finirai certes par la tuer un jour, pour le plaisir de la vaincre, tout simplement…
« Ne perdons point de temps », dit avec résolution Polly. Elle avait sa voix de tous les jours, ni plus haute ni plus basse d’un demi ton. (Oh ! comme je la haïssais d’être si calme !) Elle s’accroupit, et, en un cil d’œil, elle mit le feu à l’herbe devant elle.
Je crus pendant une seconde qu’elle était devenue folle, elle aussi. Et je hurlai de joie, semblable à un indien qui se venge.
Elle ne se troubla point. Elle était habituée à mon humeur fantasque. Elle me méprisait trop pour me craindre.
« Le feu combattra le feu, Jim. »
Nous nous reculâmes. Notre feu brillait posément, tel le bon feu des foyers paisibles. L’autre feu, nourri de milliers de lieues d’herbe dévorée, s’avançait pareil à une vague océanique de lumière et de bruit.
…Je fermai les yeux, ivre de fumée… Quand je les rouvris, deux heures après, tout était noir autour de nous. C’était des ruines d’incendie. La fournaise s’était miraculeusement éteinte.
Le Feu avait vaincu le Feu.
Polly s’était campée fièrement devant moi, les poings aux hanches. Ce qui me rendait furieux, c’est qu’elle n’avait pas eu peur pendant une seule seconde.
Elle n’aura pas peur davantage le jour où je la tuerai, parce qu’elle ne craint pas la mort. Elle ne craint pas Dieu non plus…
Elle me regardait sans broncher.
« Comme tu es lâche ! » dit-elle dédaigneusement.

RENÉE VIVIEN




La Sed se burla

Narrado por Jim Nicholls.

—¡Qué extraña puesta de sol! —le dije a Polly.
Avanzábamos en nuestros mulos agobiados por el cansancio y el calor.
—¡Imbécil! —masculló mi compañera—. Ni siquiera ves que el resplandor viene del este.
—En ese caso será la aurora. Debo de estar borracho. Y sin embargo no he bebido en todo el día.
El paso soñoliento de los mulos mecía agradablemente mis sueños.
Estábamos en plena pradera… Delante de nosotros, un desierto de hierba pálida. Detrás de nosotros, un océano de hierba pálida. En torno a nosotros rondaba la Sed. Yo veía cómo se agitaban sus labios resecos. Oía sus castañeteos de fiebre. Polly, la zorra de pelo pajizo, no la veía, lo que, por otra parte, no tiene nada de asombroso. Polly nunca pudo ver más allá de la punta de su nariz enrojecida por la intemperie y por el sol.
Me volví en la silla, tirando con fuerza de las riendas.
—¿Por qué te detienes?
—Miro a la Sed. Su vestido es gris como la hierba seca que está allá a lo lejos. Hace muecas. Se ríe con sorna. Las contorsiones de su osamenta me dan miedo. Es muy fea la Sed.
Polly, con gesto pesado y desdeñoso, se encogió de hombros.
—Estás loco, Jim. Sólo los tontos como tú tienen pesadillas así, en pleno día.
Con gusto la hubiera hecho callar dándole una patada o un puñetazo, pero algunas experiencias repetidas y dolorosas me habían persuadido de que la fuerza física de Polly superaba con mucho a la mía. Yo sólo tenía sobre ella una vaga superioridad mental. ¡Y ni eso! El sentido común de mi compañera a menudo me sacó de un apuro, cosa que no hubieran podido hacer mis divagaciones de soñador.
Tengo alguna instrucción, es cierto; pero ¿de qué sirve la instrucción en las praderas? Allá es más útil un buen revólver.
El pelo de Polly resplandecía implacablemente bajo la luz. Tuve ganas de arrancarle el cuero cabelludo, como hacen mis amigos y adversarios los indios, para salpicar de sangre esas greñas rubias. ¿Por qué? No lo sé. Son ideas que se le ocurren a uno porque sí, en las praderas.
Miré sus mejillas tostadas, que parecían dos manzanas cocidas. Ignoro por qué, en ese momento, recordé un rostro delgado y muy pálido que yo había amado hacía tiempo. Me vino a la memoria la sombra de una casita, la frescura de las persianas cerradas y los bellos párpados de la que estaba leyendo. ¡Qué encantadora era con los párpados entornados! Me encantaba la sombra de las pestañas en las mejillas blancas. ¡Ah!...
En ese entonces no conocía el oficio de aventurero de las praderas. No había conocido a la zorra de pelo pajizo.
¿Por qué dejé la casita llena de sombra y de la luz verde de los postigos cerrados? No lo sé. Tampoco sé si la extraña muchachita que leía durante largas horas está viva o muerta. ¡Creo que debe estar muerta, porque a veces siento un vacío tan grande en el corazón!
Pero no estoy seguro de nada.
Haber visto de cerca a la Sed que ronda por las praderas es algo que a uno le trastorna un poco las ideas.
Elegí por compañera de ruta a esta Polly a la que aborrezco, o mejor dicho es ella la que me eligió por compañero. Un día acabaré matándola. Eso sí que lo sé. La odio porque es vigorosamente sana y yo en cambio soy un febril debilucho. Es más atrevida y más sólida que un varón. De un papirotazo me mandaría rodando a diez metros de distancia. Por los demás es una buena giganta, cuando no ha bebido mucho. ¡Pero esa es la cuestión! No pierde ocasión de emborracharse. Quizás también ella le tiene miedo a la Sed que nos acecha a ambos.
Me aventuré a hacer una reflexión durante el camino.
—Seguramente pronto tendremos tormenta, Polly, hada mía, quimera mía.
—¡Idiota! —dijo resoplando, con convicción—. Hazme el favor de dejarme en paz. Siempre estás diciendo tonterías. Por supuesto que pronto tendremos tormenta. Es algo que se ve y se siente, y a mí no me gustan las palabras inútiles.
—¡Oh mi dulzura admirable, tu sabiduría es tan bondadosa como profunda!
No se dignó contestarme. Seguramente acabaré matándola algún día. Nunca tendré fuerzas para estrangularla, pero le pegaré un buen tiro por la espalda. Así todo habrá terminado y ya no pensaré más en ella. A lo mejor la Sed se alejará de mí cuando le haya a dado a beber sangre. ¿Quién puede saberlo?
…La aurora sobrenatural se iba haciendo más y más intensa… Al caer la tarde nos detuvimos. Polly me sirvió, de su cantimplora de panza abultada, una gota de quemante aguardiente. Brindé por su muerte próxima. De pronto, la zorra dejó de beber. Eso me sorprendió un poco. Sólo algo extraordinario podía distraer así a Polly de la extrema satisfacción que le producía su bebida favorita.
—¿Qué te pasa? —le pregunté con afectuoso interés.
A Polly, en efecto, no le gustan las palabras inútiles. Es algo que de buena gana le reconozco. De tanto andar al sol se ha vuelto taciturna. Es realmente la compañera que necesita un hombre de las praderas… Se limitó a mostrarme algunas cenizas mezcladas con la hierba gris.
Le adiviné el pensamiento. Mis ojos se volvieron instintivamente hacia el extraño amanecer que teñía de rojo el este. Pero una pequeña colina me impedía ver lo que estaba ocurriendo allá.
Polly maldijo entre dientes… Me flaquearon las piernas. Me miró desdeñosamente de arriba abajo y, alejándose de mí sin decir palabra, se dispuso a trepar la colina.
La seguí por temor a la soledad, más odiosa aún que la presencia de esa detestada compañera.
Al llegar a la cima estábamos sin aliento…
De norte a sur el horizonte no era más que una hoguera…
¡El fuego en la pradera! Un viento de llamas que le cae a uno encima con la velocidad del simún y del siroco, que barre en un abrir y cerrar de ojos el desierto de hierbas secas. ¡Y no hay nada a su paso capaz de detenerlo!
Yo tiritaba como un enfermo que se muere de fiebre… Polly, en cambio, no tenía nada de miedo.
Olvidé un poco mi angustia, rabioso porque no veía que le castañeteasen los dientes. Su terror hubiera casi calmado mi propio espanto. Pero ella es valiente, mucho más valiente que yo. No palidecía porque nada en el mundo, ni la muerte ni la trompeta del Juicio Final, podrían hacerla palidecer… Por lo demás, es de tez rojiza, mientras que yo me había puesto más amarillo que una guinea.
Volvimos apresuradamente a nuestro campamento improvisado, donde habíamos dejado pastando a los mulos que, con el miedo, se ponían asustadizos.
La brisa de la tarde empujaba hacia nosotros el huracán de llamas.
No le temo a la muerte, pero el dolor me espanta. La perspectiva de asarme vivo me atenazaba del modo más intenso. La misma Polly estaba seria, aunque tiene nervios más robustos que tendones de buey.
…¡Asados vivos en la pradera!...
El fuego avanzaba como un inmenso relámpago. Me sorprendió la rapidez de su progreso. Unos minutos más y ambos quedaríamos calcinados. Unos minutos más y…
…Era hermosa, pese a todo, esa tromba de llamas. Era algo más hermoso que el sol. Nunca he visto nada tan magnífico… Era algo tan maravillosamente espléndido que caí de rodillas y tendí ambos brazos hacia el Fuego, riéndome como se ríen los chiquillos y los idiotas.
Repito que era algo tan aterrador como soberbio y que casi me volvió loco. Era algo demasiado hermoso para los ojos de un hombre. Únicamente Dios podía mirar de frente aquel incendio sin por eso morir o perder la razón.
Pero Polly que tiene tan poca alma como mis mulos no comprendió y miró sin ver. No se sorprende por nada, no admira nada…
Yo la odiaba porque ella no tenía miedo. ¡Ah, cómo la odiaba!... La odio ferozmente porque es más fuerte y más valiente que yo… La odio así como una mujer aborrece al hombre que la domina. Sin duda un día acabaré matándola, nada más que por darme el gusto de vencerla…
—No perdamos tiempo —dijo Polly con resolución. Tenía la voz de todos los días, ni un semitono más alta o más baja. (¡Ah, cómo la odiaba yo por estar tan tranquila!). Se puso en cuclillas y, en un abrir y cerrar de ojos, prendió fuego a la hierba que tenía delante de ella.
Durante un segundo creí que también ella se había vuelto loca. Y grité de alegría, como un indio que se venga.
No se inmutó. Estaba acostumbrada a mi temperamento caprichoso. Me despreciaba demasiado como para temerme.
—El fuego combatirá al fuego, Jim.
Nos echamos atrás. Nuestro fuego brillaba serenamente, como el buen fuego de los hogares apacibles. El otro fuego, alimentado por miles de leguas de hierba devorada, avanzaba semejante a una ola oceánica de luz y ruido.
…Cerré los ojos, ebrio de humo… Cuando volví a abrirlos, dos horas después, todo estaba negro a nuestro alrededor. Eran ruinas de incendio. La hoguera se había apagado milagrosamente.
El Fuego había derrotado al Fuego.
Polly estaba erguida altivamente frente a mí, con los brazos en jarras. Lo que me ponía furioso era que no había tenido miedo ni por un segundo.
Tampoco tendrá miedo el día que la mate, porque no le teme a la muerte. Ni siquiera le teme a Dios…
Estaba ahí quieta, mirándome.
—¡Qué cobarde eres! —dijo con desdén.