domingo, 17 de marzo de 2013

Bossuet: Oración fúnebre de Enriqueta Ana de Inglaterra


MONSEIGNEUR,
j'étais donc encore destiné à rendre ce devoir funèbre à très haute et très puissante princesse Henriette Anne d'Angleterre, duchesse d'Orléans. Elle, que j'avais vue si attentive pendant que je rendais le même devoir à la reine sa mère, devait être si tôt après le sujet d'un discours semblable, et ma triste voix était réservée à ce déplorable ministère. 
        Ô vanité ! ô néant ! ô mortels ignorants de leurs destinées ! L'eût-elle cru, il y a dix mois ? Et vous, messieurs, eussiez-vous pensé, pendant qu'elle versait tant de larmes en ce lieu, qu'elle dût si tôt vous y rassembler pour la pleurer elle-même ? Princesse, le digne objet de l'admiration de deux grands royaumes, n'était-ce pas assez que l'Angleterre pleurât votre absence, sans être encore réduite à pleurer votre mort ? Et la France, qui vous revit, avec tant de joie, environnée d'un nouvel éclat, n'avait-elle plus d'autres pompes et d'autres triomphes pour vous, au retour de ce voyage fameux, d'où vous aviez remporté tant de gloire et de si belles espérances ? 
        Vanité des vanités, et tout est vanité ! C'est la seule parole qui me reste ; c'est la seule réflexion que me permet, dans un accident si étrange, une si juste et si sensible douleur.
        Aussi n'ai-je point parcouru les livres sacrés pour y trouver quelque texte que je pusse appliquer à cette princesse. J'ai pris, sans étude et sans choix, les premières paroles que me présente l'Ecclésiaste, où, quoique la vanité ait été si souvent nommée, elle ne l'est pas encore assez à mon gré pour le dessein que je me propose. Je veux dans un seul malheur déplorer toutes les calamités du genre humain, et dans une seule mort faire voir la mort et le néant de toutes les grandeurs humaines. Ce texte, qui convient à tous les états et à tous les événements de notre vie, par une raison particulière devient propre à mon lamentable sujet ; puisque jamais les vanités de la terre n'ont été si clairement découvertes, ni si hautement confondues.



MONSEÑOR:
Destinado estaba aún a rendir este fúnebre deber a la muy alta y muy poderosa princesa Enriqueta Ana de Inglaterra, duquesa de Orleáns. ¡Ella, a quien había visto tan atenta en tanto rendía el mismo tributo a la reina su madre, debía ser poco después objeto de un discurso semejante! ¡Y a mi triste voz estaba reservado este deplorable ministerio! ¡Oh vanidad!, ¡oh mortales ignorantes de su destino! ¿Lo hubiese creído ella hace diez meses? Y vosotros, señores, ¿habríais pensado, en tanto ella vertía tantas lágrimas en este lugar, que debíais reuniros tan pronto para llorarla a ella misma? Princesa, objeto digno de la admiración de dos grandes reinos, no era bastante que Inglaterra llorase vuestra ausencia, sino que ha sido preciso lamentar también vuestra muerte? ¿Y la Francia que os había visto con tanta alegría, rodeada de nuevo brillo, no tenía para vos otras pompas y otros triunfos, a la vuelta de ese famoso viaje de que habíais traído tanta gloria y tan bellas esperanzas? “Vanidad de vanidades y todo vanidad.” En tan justificado y sensible dolor, en accidente tan extraordinario, ésta es la única palabra que me queda, la única reflexión que me permito. No he recorrido los libros sagrados para hallar texto que aplicar a esta princesa; he tomado sin estudio y sin elección las primeras palabras que el Eclesiastés me presenta, en las cuales aun cuando la vanidad se nombra a menudo, no se nombra todo lo que quisiera para la realización del plan que me propongo. Quiero en una sola desdicha deplorar todas las calamidades del género humano, y en una sola muerte hacer ver la muerte y la nada de todas las grandezas humanas. Ese texto que conviene a todos los estados y a todos los acontecimientos de nuestra vida, por una razón particular, es adecuado al lamentable asunto que voy a tratar, pues jamás las vanidades de la tierra se han visto tan claramente reveladas, ni tan solemnemente confundidas.

Traducción de Rafael Ginard de la Rosa.

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